Extrait du livre de THICH NATH HANH, grand maître du bouddhisme, Prendre soin de l’enfant intérieur, dans lequel il s’interroge sur ce que nous pouvons faire pour transformer les graines de souffrance parfois si profondément enracinées en nous.
« Nous savons que naissance et mort, maladie et vieillesse font partie de la vie. Nous ne voulons pas vieillir, ni tomber malade, ni mourir, mais ainsi est la vie… Si nous nous révoltons, si nous protestons, nous souffrirons encore plus. Inversement, si nous acceptons la vie et tout ce qu’elle implique – les moments de bonheur, de joie, de paix, mais aussi la maladie, la vieillesse et la mort -, alors nous ne souffrirons plus. Ainsi, la souffrance est acceptable. Et non seulement elle est acceptable mais, grâce à elle, nous avons une opportunité d’expérimenter le bien-être.
Si nous voulons surmonter la peur, nous pouvons commencer par simplement prendre conscience de sa présence en nous. Puis, dans un second temps, nous pouvons faire naître en nous l’intention de ne pas la fuir. La fuite est en effet une réaction très courante chez nous, car ce n’est pas agréable d’avoir peur. Nous ne voulons pas vivre avec elle mais elle revient, sans cesse ; nous craignons toujours qu’il arrive quelque chose, cet après-midi ou demain. Nous vivons avec cette peur de l’impermanence. Cette deuxième étape de la transformation consiste donc à être déterminé à ne pas fuir, pour examiner en profondeur notre angoisse et l’accepter pleinement.
Le processus de transformation repose sur une troisième étape, qui consiste à agir de façon appropriée face à la peur. En effet, si nous acceptons de lui faire face et d’en faire profondément l’expérience, nous pourrons observer quelle est notre réaction face à elle. Nous verrons si nous réagissons avec confusion ou déni ; ou, à l’inverse, si nous y répondons avec gentillesse, acceptation et compassion. C’est précisément cette réponse clairvoyante qui apportera la guérison.
Désormais, puisque nous savons comment susciter la guérison, nous pouvons éviter que la souffrance ne nous surprenne. Avec l’entraînement, notre pleine conscience gagnant en force et en stabilité, nous n’avons plus à attendre que les graines de souffrance surgissent à l’improviste pour en prendre soin. Nous savons qu’elles résident au cœur de notre conscience du tréfonds. Nous pouvons donc les inviter à venir dans le champ de notre conscience mentale et les éclairer à la lumière de notre pleine conscience.
Il est essentiel de se renforcer avant de traiter la souffrance. En effet, prendre soin du mal-être, c’est un peu comme essayer d’attraper un serpent venimeux. Nous devons d’abord apprendre à connaître le serpent et, en parallèle, nous devons développer notre habileté et notre stabilité afin de pouvoir l’attraper sans nous blesser. Une fois cette étape accomplie, nous serons prêts à faire face au serpent. Au contraire, si nous ne nous confrontons jamais à lui, viendra le jour où il nous prendra par surprise, et nous perdrons la vie à la suite de sa morsure.
Il en va de même avec la douleur que nous gardons dans les profondeurs de notre conscience. Lorsqu’elle enfle et nous met au défi, il n’y a rien que nous ne puissions faire si nous ne nous sommes pas entraînés à renforcer et à stabiliser notre pleine conscience. Nous ne devrions donc pas inviter notre souffrance à remonter avant d’être réellement prêts à l’accueillir. Alors, quand elle arrivera, nous pourrons la gérer en toute sécurité. Transformer la souffrance ne veut pas dire la « combattre » ni « se débarrasser » d’elle. Il s’agit tout simplement de la baigner dans la lumière de notre pleine conscience. »
Extrait de Prendre soin de l’enfant intérieur – Faire la paix avec soi de THICH NATH HANH.
Pour aller plus loin,
Les articles précédents : La présence consciente, c’est quoi ? et Nos émotions : comment les accepter et les gérer ?